L'Institut d'Histoire contemporaine "Pier
Amato Perretta " de Como est un centre de recherche qui
a célébré son 25° anniversaire en
octobre 2002. Il est associé à l'Institut National
d'Histoire du Mouvement de Libération. Parmi les thèmes
de prédilection qui font l'objet de recherches par
l'Institut, nous trouvons la Résistance et la Seconde
Guerre mondiale, le mouvement ouvrier, les mouvements associatifs
populaires et l'histoire sociale de l'ensemble du territoire.
Ricciotti Lazzero, a étè Président depuis
1998 a disparu en décembre 2002. Il était l'auteur
de " Gli schiavi di Hitler "(Les esclaves d'Hitler),
traitant du travail obligatoire des Italiens sous le IIIe
Reich. Il a suscité un renouveau d'attention sur la
déportation des Italiens en Allemagne nazie.
L'histoire de la déportation de plus de six cent mille
militaires et civils italiens par les forces armées
allemandes, leur enregistrement et leur internement dans les
lagers, leur travail éreintant pour la production de
guerre, tant dans l'industrie et l'agriculture que dans les
autres services de l'Allemagne hitlérienne, fait partie
intégrante de l'Histoire de l'Europe. Elle est le patrimoine
commun de toutes les victimes du nazisme. Pour ces femmes
et ces hommes, pour ces civils et ces militaires, la seule
perspective d'avenir était : survivre et résister.
On estime à plus de quarante mille le nombre de militaires
italiens morts sur le sol des territoires occupés par
le Reich pendant la dernière guerre. Le nombre de civils
déportés est plus imprécis et la dureté
de leur exploitation eut pour conséquence un taux élevé
de mortalité. L'absence d'une recherche systématique
approfondie sur les circonstances de leur arrestation et de
leur déportation ne permet pas encore aujourd'hui d'établir
un nombre précis
.
Les Italiens, comme des millions de citoyens des pays d'Europe
occupés par les Nazis furent déportés
vers des camps de travail, des chaînes de montage, pour
remplacer les générations aryennes envoyées
sur les différents fronts. Comme tous les esclaves
d'Hitler, ils vécurent un véritable enfer sur
terre dont le quotidien n'était que faim, désolation,
bombardements, discipline et mort.
Les jours qui suivirent l'annonce de l'Armistice avec les
alliés, le 8 septembre 1943, plus de 600.000 militaires
furent déportés vers l'Allemagne. Dans les mois
qui suivirent, ce sont plusieurs dizaines de milliers de civils
italiens qui prirent le même chemin (juifs, partisans,
antifascistes, ouvriers en grève ou simplement des
victimes des razzias menées par les troupes allemandes
et les formations militaires de la République Sociale
italienne à la recherche de main d'oeuvre pour les
entreprises allemandes.
Tous les récits des internés militaires décrivent
d'une même voix la désorientation totale dans
laquelle sombra l'armée au lendemain du 8 septembre,
le sentiment semblable à la honte, le dépaysement
et le désarroi dans lequel s'enfoncèrent ces
jeunes, nés dans le fascisme, élevés
au sein de son école, envoyés au combat sur
plusieurs fronts et finalement abandonnés à
eux-mêmes.
Coupés du monde, sans soutien légal, pas même
de la Croix-Rouge, ils développèrent une solidarité
très forte pour survivre et résister à
la dureté de leurs conditions de vie. Ils auraient
pu échapper à la prison mais la grande majorité
refusa les propositions d'enrôlement. Ils payèrent
très cher le prix de leur décision, leur NON
à la guerre nazie et fasciste.
Des témoins de la tragédie juive racontent,
et les historiens allemands corroborent leurs récits
: ils furent traités à peine mieux que les Russes,
tels que la hiérarchie du systéme des Lagers
les définissait.
Evidemment, certains connurent des conditions meilleures,
furent aidés par des Allemands ou travaillèrent
dans les campagnes, dans les exploitations agricoles, mais
le poids du travail en usine et dans les mines, l'emploi de
masse dans les grandes oeuvres de défense de l'Est,
les conditions de détention, la faim, les humiliations
et les violences, tout cela donna l'image d'une Allemagne
semblable à un immense camp unique dans lequel les
Lagers opéraient en tant que système de régulation
du travail obligatoire, ressource indispensable pour la guerre
combattue par la bourgeoisie industrielle allemande, fondée
sur l'anéantissement des droits individuels.
Le retour pénible vers l'Italie, rocambolesque ou assisté,
n'offrit pas d'occasion de rachat : celui qui retourna au
pays, meurtri et bouleversé, trouva une concurrence
sévère sur le marché du travail, l'indifférence
d'un pays en phase de réorganisation, qui voulait oublier
la guerre au plus vite et déjà en proie à
de nouveaux problèmes dans un nouveau cadre international.
Lentement, le processus d'intégration contraignit
cette masse de jeunes, de paysans et d'ouvriers arrachés
au système du Lager, à tirer leur plan, dans
le silence de la mémoire, dans la reconstruction du
pays.
Malgré le fait que le drame de la déportation
a été un des drames majeurs de la guerre, le
destin de ces hommes semble être oublié de la
conscience historique du pays. Les carences de l'historiographie
découlent " in primis " de la difficulté
de la société italienne de l'après-guerre
à faire face au fascisme et à sa guerre, celle
du 8 septembre, la République Sociale et dans le fond,
à la Résistance. Mal vus des fascistes parce
qu'ils n'avaient pas adhéré à la république
fantoche de Mussolini, suspects aux yeux de la bureaucratie
et de l'armée parce qu'ils avaient été
arrêtés, les vicissitudes des internés
militaires italiens ont été oblitérés
par le paradigme de la Résistance militaire et politique
comme seule et unique forme de résistance légitime.
Il pèse sur eux, en fin de compte, telle une chape
de plomb, de nouveaux équilibres internationaux. Les
question sans réponses foisonnent car elles furent
écrasées par la volonté d'oublier rapidement
; leur " memoire inutile " fut rapidement digérée
dans un climat de reconstruction et de guerre froide.
Leur cas fut jugé comme un phénomène
gênant, " mineur " en regard des autres drames
de la guerre, une historie juste bonne à recevoir un
bref coup d'il " pieux. Seule la voix des protagonistes
a réussi à maintenir vivant le souvenir d'une
vie volée et d'une vie de labeur, de violence et d'abandon
qu'ils ont été contraints d'assumer. Rares sont
les études sur le sujet, et lorsqu'elles existent,
elles se limitent au domaine des associations d'Anciens Combattants,
aux récits lies à l'histoire de la Résistance.
La plus grande partie des publications sur le sujet (Claudio
Sommaruga en a recensé 526) est constituée à
partir de souvenirs. Cela est particulièrement significatif
si l'on considère que les deux recherches organiques
principales sur les internes militaires italiens sont l'uvre
de deux Allemands comme Gehrard Schreiber et Gabriele Hammermann.
La faiblesse historiographique et politique des déportés
italiens fut mise en évidence en 2000,lorsque la République
Fédérale d'Allemagne a adopté une loi
destinée à dédommager les travailleurs
forces du III Reich. Les militaires italiens ont été
exclus de ce programme parce qu'ils étaient considères
" prisonniers de guerre. Il s'agissait d'une décision
fondée sur un évènement historique totalement
faux : un chef-d'uvre d'hypocrisie, un affront ultime,
l'humiliation suprême à une génération
" trahie, désespérée, oubliée
" comme l'a si bien dit Gehrard Schreiber. A ce stade
,la loi allemande apparaît comme une initiative prise
dans le seul but de banaliser la mémoire, un parcours
raté et à sens inverse qui démontre la
difficulté actuelle de l'Allemagne de régler
définitivement ses comptes avec le passé. Une
telle situation constitue un terrain friable sur lequel il
est impensable de pouvoir construire une mémoire commune,
une boussole pour un avenir européen.
Le projet " Voix, visage, mémoires des dépotés
italiens en Allemagne nazie ", préparé
par l'Institut Perretta, a pour objectif de recueillir les
témoignages des déportés italiens.
Sa mise en oeuvre fut possible grâce aux compétences
de la section vidéo de l'Institut Perretta, a pour
objectif de recueillir les témoignages des déportés
italiens.
Sa mise en oeuvre fut possible grâce aux compétences
de la section vidéo de l'Institut Perretta, a pour
objectif de recueillir les témoignages des déportés
italiens.
Sa mise en ouvre fut possible grâce aux compétences
de la section vidéo de l'Institut et grâce à
un subside de la Région Lombardie, ce qui a permis
l'adéquation technologique des instruments de reprise
et de post-production.
Le projet prévoit le rassemblement d'interviews dont
l'objectif est d'approfondir au maximum la recherche pour
mener à bien la campagne en faveur de l'indemnisation.
Les témoignages audiovisuels récoltés
jusqu'à présent appartiennent à des déportés
civils et à des internés militaires ; ils ont
été enregistrés au Centre audiovisuel
de l'Institut. A còté de ces interviews en studio,
nous avons ajouté des témoignages recueillis
en Lombardie, au Piémont, dans les Marches et les Abruzzes,
à domicile ou dans les locaux spécialement préparés
pour l'occasion par des associations locales ou à l'occasion
de commémorations d'anciens combattants.
Les interviews prévoient une série de questions
sur les étapes et les aspects de la déportation,
de l'internement, du travail obligatoire, de la libération.
Les questions initiales se réfèrent à
la période précédant la déportation
et s'attachent principalement à cerner la famille et
le milieu, l'éducation, le travail, l'expérience
militaire et l'expérience pendant la guerre. Pour clôturer
l'interview, des questions abordent la réinsertion
après le retour en Italie.
Le rassemblement de ces témoignages audiovisuels s'accompagne
d'un travail de recherche axé sur le classement, l'informatisation
et l'étude de plus de douze mille fiches personnelles,
corroborés par des documents, des images, de brefs
mémoires, journaux intimes d'anciens déportés,
rassemblés depuis l'an 2000 dans le cadre de la campagne
pour l'indemnisation du travail obligatoire en Allemagne nazie,
soutenue par notre Institut en collaboration avec des Associations
d'anciens combattants, d'organisations syndicales et d'autres
Instituts d'Histoire.
La modulation de la recherche au cours de trois années
par le biais de projets spécifiques avec la Communauté
européenne, Région Lombardie, la Fondation Cariplo,
la Fondation Provinciale de la Communauté de Còme,
a abouti à la création d'un site Internet :
www.schiavidihitler.it, au classement de 3.000 fiches et à
leur publication sur le site aux còté de 300
brefs souvenirs, des images, des instruments de recherche,
et à la récolte de cinq cents vidéos
de témoignages.
La recherche s'est ajoutée à une activité
intense d'assistance personnelle aux anciens déportés,
mise en place au bénéfice de la Fondation "
Mémoire, Responsabilité, Avenir. Elle s'intègre
également aux activités de la " Coordination
nationale des Organisations, Associations et Instituts pour
l'indemnisation du travail obligatoire en Allemagne nazie
" et participe à des initiatives publiques. Au
cours des derniers mois, nous avons assisté en outre
à l'intensification des relations de travail avec des
groupes locaux de recherche en Allemagne.
Prof. Valter Merazzi
(Directeur d'Istituto di Storia Contemporanea " P.A.
Perretta " , Como, responsable du Centro di Ricerca "Schiavi
di Hitler".
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